lundi 30 novembre 2009

La première assemblée municipale

Autour de cette table du conseil, nous étions tous sur le point de fêter pour la troisième fois cette victoire. Pour moi, cela contredisait la morale populaire et le célèbre alexandrin de Pierre Corneille: A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.

Je frissonnais, car depuis une semaine, j'avais souvent entendu : "On leur a mis onze à zéro !". Et pour filer cette métaphore sportive, je savais intérieurement, qu'un match se gagne aisément, lorsque l'arbitre joue dans notre camp.

Un arbitre un peu spécial.
Un arbitre qui soufflait largement ses volontés au capitaine d'une équipe.
Un arbitre qui changeait les règles en cours de match.
Un arbitre qui fermait les yeux sur certaines fautes (qu'il avait commises lui-même parfois).

Fin de l'analogie, et de l'anaphore. Cet arbitre était notre illustre prédécesseur, le Baron local.

Je frémissais, nous avions gagné, et alors que ceux qui étaient censés être nos "fidèles" électeurs (soit des proches de la municipalité, soit certains anciens conseillers municipaux), m'avaient demandé à plusieurs reprises que notre prédécesseur ne se mêle pas de cette nouvelle mandature, qu'il ne pilote pas notre Maire ni le conseil municipal, et après une discussion entre colistiers durant nos réunions préparatoires, cette affaire semblait réglée.

Pourtant je restais persuadé que ce problème subsistait.

Ne vous méprenez pas, je trouvais que l'action municipale antérieure était exceptionnelle, et l'héritage - projets réalisés ou en cours - prospère. Je n'apprendrai que bien plus tard le mode de financement de ce programme, reposant essentiellement sur la dette.

Aux messages de nos supposés soutiens, s'ajoutaient ceux des électeurs qui auraient préféré voir nos adversaires nous défaire. Eux aussi souhaitaient que notre conseil ne soit pas une chambre d'enregistrement des volontés de l'ancien Maire, ni de l'actuel d'ailleurs.

La loi dit "Le Conseil Municipal émet des vœux sur tous les objets d'intérêt local" (L2121-29 du Code Général des Collectivités Territoriales). Le Conseil, et non pas Le Maire. Pour moi, il était acquis que le conseil aurait une certaine indépendance...

Soudain, je fus extrait de mes pensées par le discours du Directeur. Car il était doyen de l'assemblée délibérante, et prit à ce titre, la présidence de la séance le temps d'élire un nouveau Maire, qui sera naturellement le Successeur désigné depuis longtemps. Je fus stupéfait de la violence des propos à l'encontre de nos opposants, vaincus, à terre, alors même que certains d'entre-eux assistaient, en bons citoyens au premier conseil municipal de notre équipe. Le bellicisme de cet ancien fonctionnaire les brisa tout net. Tout montrait que le Directeur serait la nouvelle tête pensante, quelles que soient les volontés du Baron et de son Successeur. L'apogée du déchaînement de son allocution, se télescopa avec un pied-de-nez aux deux autres responsables, réputés communistes, dans la citation d'un fameux rédacteurs en chef du Figaro : "Un citoyen français a deux sortes d'ennemis également redoutables : ceux qui violent les lois et ceux qui les observent avec rigueur.". Le Directeur ne doutait pas de l'ignorance de son auditoire et pu ainsi se gausser de ses partenaires sans que nul autre que moi ne l'ait noté. J'imaginais, non sans humour, André Stil cité par François Fillon lors de la nomination de son gouvernement.

Désormais, je bouillais, le Baron local aurait-il pu se faire jouer de la sorte ? J'apprendrai plus tard les méthodes de persuasion que le Directeur pouvait déployer.

Aujourd'hui encore, je regrette de ne pas avoir demandé pardon à nos opposants, pour la violence de nos attaques, même si ces excuses avaient revêtu la forme de celles de Ségolène Royal pour les propos de Nicolas Sarkozy (Sur Zapatero ou dans le discours de Dakar).

Ces regrets n'ont aucun sens, car aucun effort n'est requis pour se défendre des erreurs d'un autre.

dimanche 29 novembre 2009

One

Ce titre énigmatique renvoie à une chanson du groupe Metallica, qui illustre le roman et le film Johnny s'en va-t-en guerre dont le personnage principal ressemble énormément à la personne qui inspire ce billet.

Aujourd'hui je voulais revenir sur un article qui a beaucoup été commenté dans la blogosphère, il s'agit de l'histoire de Rom Houben dévoilée dans le dailymail (et reprise plus tard dans le Figaro). Koz, notamment, s'est précipité sur le thème de l'euthanasie. Il en va de la liberté des blogueurs de s'emparer de cette "actualité", je le met entre guillemets car Rom a été correctement diagnostiqué il y a trois ans déjà.

Pour ma part, je me permettrai juste de rapidement philosopher malgré les minces notions de cette science de la sagesse que la nature et un manque de courage total, m'ont doté.

Je retiens de l'effroyable expérience vécue par Rom, que la vie ne vaut d'être vécue que si elle est partagée. "La frustration est un mot trop faible pour décrire ce que je ressentais" a t'il dit aurait-il communiqué (via la méthode controversée dite de "Facilitated Communication", merci Pascal) pour évoquer le calvaire que fut son existence dans un présumé coma, alors qu'il était conscient mais incapable de s'exprimer auprès de son entourage.

J'ai eu la chance, pour ma part, de côtoyer un tas de gens, des ultra-riches, des galériens, des actifs, des flemmards, et le plus petit dénominateur commun au malheur de ces hommes, c'est l'isolement.

La vie en communauté devrait pouvoir tous nous satisfaire. Il arrive que certains pensent que la comparaison aux autres est suffisante à leur bonheur: "J'arrive à faire plus que...", "je gagne plus que...", "je dépense plus que...", selon le vieil adage « Quand je me considère, je me désole, mais quand je me compare, je me console. » ; cette compétition permanente ne devrait, au regard de l'histoire de cet homme, jamais nous faire oublier que seuls, nous ne sommes rien, et que la vie n'aurait aucun sens.

Update (29/11/2009 16:50): Pascal, dans les commentaires, me fait très justement remarquer que des doutes subsistent sur la véracité du cas "Locked-in Syndrom" dans cette histoire.

samedi 28 novembre 2009

Climategate

Alors que la prestigieuse Académie des sciences refuse de prendre une position unanime sur le rôle du CO2 et des émissions anthropiques sur le réchauffement climatique, préférant publier un exhaustif, mais fort intéressant, pavé de 80 pages intitulé Libres points de vue d'Académiciens sur l'environnement et le développement durable, dans le même temps, un acte de piratage informatique faisait couler, et continue encore, quelques octets sur la toile.

Des "hackers" ont ciblé leurs attaques contre un centre de recherche climatique majeur (une version française ici), et ont décidé de communiquer une partie de ce qu'ils y ont trouvé, se justifiant ainsi:

"We feel that climate science is, in the current situation, too important to be kept under wraps. We hereby release a random selection of correspondence, code, and documents." que l'on pourrait traduire par "Nous estimons que la science du climat est, dans la situation actuelle, trop importante pour être tenue secrète. Nous divulgons une sélection aléatoire de la correspondance, du code et des documents".

C'est 61 Mégaoctets d'échanges de courriers électroniques, et d'autres documents de toute sorte, qui ont "fuité". Il est d'abord étonnant que cela se produise peu avant le Sommet de Copenhague qui se voulait être le grand soir pour les politiques de tous les pays participants, mais ce qui est plus grave, ce sont des éléments qui ressortent de la correspondance, et sont largement repris par ceux que l'on appelle péjorativement les "climato-sceptiques".

Ce qui m'a le plus choqué personnellement, c'est la guérilla menée contre les chercheurs qui essayent de scientifiquement contester les résultats du GIEC, et notamment Vincent Courtillot, contre lequel ils organisent littéralement une vendetta titrée "les Chevaliers de l'Ordre de la Terre Plate" et reproduit par Le Monde et Libération.

Cette animosité relève plus du combat politique que de la recherche scientifique, les enjeux économiques et sociaux sont majeurs, et cela ne m'étonnerait pas d'apprendre qu'un industriel aurait provoqué la publication de ces données. Cependant, les pirates sont souvent férus de liberté d'informer et on peut sans doute y trouver la même proportion de conspirationnistes que dans la population normale. Je n'exclue donc pas que leur démarche soit sincère et désintéressée.

La politique sociale ou économique ne devrait jamais s'affronter sur le terrain de la science, je continue de penser que si nous démontrons que l'humain n'est pas en cause dans le réchauffement climatique, la rupture entre sciences et citoyens sera immédiate, et nous devrons craindre un retour à une forme d'obscurantisme.

vendredi 27 novembre 2009

Premier tour, seul scrutin

Lors de mon précédent billet libellé historique, je faisais référence aux élections gagnées en un seul tour, il me plairait maintenant de réexaminer ce dernier.

L'atmosphère dans laquelle nous fûmes élus ne se distinguait pas par un fair-play ni une élégance particulière, bien au contraire. Alors que nous disposions de l'appui indéfectible de la plupart de nos prédécesseurs qui avaient été associés à un courrier diffamant, dont je vous ai, plusieurs fois, parlé, le Baron, encore maire, ne put s'empêcher d'agir de manière partisane en franchissant encore les limites de la légalité, et ce, bien que le code électoral lui attribue, d'abord dans sa partie législative, et ensuite dans sa partie réglementaire l'essentiel des devoirs (et des pouvoirs associés) pour l'organisation du vote et de bonne tenue des listes électorales.

Ainsi, il en coûta cher à la liste d'opposition, d'ajouter des stylographes aux isoloirs, afin de permettre aux électeurs de rayer l'un ou l'autre des membres d'une liste au profit d'un nom qu'ils préfèrent, conformément à la réglementation en vigueur dans les communes de moins de 3500 habitants. Ne se contentant pas de voler de façon aussi répétée qu'indiscrète ces "bic" au cours de leurs visites de contrôle des bureaux de vote, le Baron, flanqué de son futur Successeur, fit un geste qui démontrerait là son horrible autorité, et scellerait dans mon esprit l'immonde image que je garde, encore aujourd'hui, de ce pauvre bougre: il jeta un stylo à la figure d'un des assesseurs qui se trouvait à mes côtés, en affirmant, du plus haut ton teinté de droiture que la colère d'un homme pourtant si petit et tordu pouvait permettre, qu'il était illégal de laisser un stylo dans l'isoloir, et qu'il ne voulait plus en voir.

Dès lors que je finis mon tour de rôle d'assesseur, je m'empressai de joindre le service des élections de la Préfecture pour en savoir plus sur la légalité du comportement de mes adversaires politiques. Et il s'avérait qu'il n'y avait aucune précision à ce sujet. Parfois les (mal-)journalistes, souvent les politiciens (il est de plus en plus difficile de faire la différence) parlent de "vide juridique", en lecteur assidu de Maitre Eolas, je présumais que si rien n'interdisait de mettre un stylo dans un isoloir il ne fallait pas s'en priver, je partis donc dans la minute, informer mes opposants de leurs droits.

Je ne voulais pas d'une victoire facile. J'allais évidemment être déçu.