jeudi 29 avril 2010

Fumante cacophonie électorale

Il est un comportement que nous observons fréquemment quand un éventuel candidat à une élection s'exprime: ce sont les grandes reculades, les nombreux rétro-pédalages, les annonces suivies de démentis. Prenez, comme récent exemple national, le fameux démenti de Carla Bruni (s'exprimant au nom de son mari) sur l'"inimaginable" enquête de police autour de LA rumeur, démenti se télescopant avec les indications du patron de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) au site Mediapart, puisqu'il y expliquait que ses services essayaient de "déterminer d'où étaient parties ces rumeurs". Ce désordre laissa rapidement place, selon les confidentiels du Figaro, à une retraite qui n'est pas sans rappeler la tactique militaire de la terre déserte, alors même que certains commençaient à lancer l'idée de primaires à l'U.M.P. . Parfois, dans ces périodes pré-électorales, les analystes, journalistes politiques ou simples observateurs s'agacent de cette prudence exagérée lors de la composition des listes de candidats.

Et bien, sachez que pour les élections aussi anodines que celles d'un président d'une toute petite communauté de communes, j'ai pu remarquer exactement la même attitude. En fait, si vous avez la chance d'assister à la désignation de ce président, vous avez peut-être compris que tout s'est joué en bureau restreint, en "off" pour reprendre un terme à la mode, afin d'éviter un scandale, et de ne pas afficher une désunion du conseil communautaire. Parfois un outsider, un franc-tireur, une commune isolée dans notre cas, veut tâter le terrain: des gens lancent le nom de leur candidat fétiche, alors même que ce dernier assure de son soutien total le candidat du consensus de la communauté. Ce double discours, comme dans la politique nationale, peut viser de multiples objectifs: le premier, c'est le fumigène, le temps passé pour démêler le faux du vrai n'est pas utilisé pour travailler; le second, c'est la franche reculade face à la grosse bêtise, esquiver l'aveu d'un bluff, en le faisant endosser par un autre; dans le cas de mythomanes pathologiques, comme ceux dont je parle souvent, nous pourrions être dans une inutile tentative de manipulation, visant à diviser la communauté en encourageant d'autres communes à, elles aussi, proposer leur candidat. Espérant ainsi établir une triangulaire, ce genre de Machiavels en carton-pâte rêvent peut-être de gagner cette élection sur la majorité relative en trois tour, ou pire, l'élection du candidat le plus âgé en cas d'égalité des voix (article L2122-7 du Code Général des Collectivités Territoriales, applicable aux maires, transposable aux présidents d'établissements publics de coopération intercommunale par l'article L5211-2 du même code).

Pour une ancienne petite baronnie locale, où le monarque à la retraite, essaye de continuer de tirer les ficelles, puisqu'il a engagé l'avenir de sa commune sur deux ou trois projets portés financièrement par l'E.P.C.I. en question, ces élections sont vitales. Mais la vision de baron fatigué est courte, car il est aveuglé par la reconquête d'un pouvoir qui lui échappe, et par capillarité, qui échappe à sa propre commune, car chaque conseiller de sa majorité municipale, qui la représente au conseil communautaire, est immanquablement lié à l'image de ce précédent Maire, ce qui exclue d'office leur candidature à la présidence. Les enjeux sont encore plus important dans certains cas: Souvent, si un président de communauté est maire d'une des communes, sa gestion peut sembler centrée autour de sa commune, et parfois les autres conseillers de l'E.P.C.I le lui reprochent, soit parce qu'elle est déjà géographiquement centrale, ou alors c'est déjà la plus riche, etc. Tous les moyens sont bons pour tirer la couverture à sa petite commune désœuvrée qui n'a pas autant qu'elle mérite (oui, malheureusement, dans communauté de communes, les élus oublient souvent que le premier mot n'est pas commune). Et si il y a pire qu'un Maire pour exercer le mandat de président de communauté, c'est bien un futur maire, sa gestion sera tout entière calquée sur un agenda dans le seul et unique but de présenter un bilan exceptionnel à sa commune au moment des municipales suivantes.

La leçon que le baron local aura reçu le jour de cette élection et durant tout le mandat de cette intercommunalité, c'est qu'il aurait du prendre de plus gros risques pour que sa commune conserve son influence. Et prendre des risques, dans ce "métier", c'est viser la pacification des relations en apportant des garanties solides, ne plus persévérer dans des manipulations qui ne tiennent pas une journée tellement il est devenu lisible pour la plupart des élus du voisinage...

Quelquefois, prendre des risques, c'est se calmer.

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